30.9.24

Le Feu follet sur Arte

 


Depuis le 23 septembre et jusqu’au 15 décembre 2024, le film « Le Feu follet » de Louis Malle est disponible gratuitement sur Arte. Cliquez ICI pour voir le film. Ceux qui n’ont pas encore vu l’un des plus beaux films du cinéma français du XXe siècle n’auront vraiment plus d’excuses! C’est grâce à ce film que j’ai écrit la biographie de Jacques Rigaut.

7.9.24

Trouvaille

 






Une curiosité que cet exemplaire du "Feu follet" (trouvé dans une boîte à livres) avec une dédicace (“ce récit des tristesses des grandes villes”) à Louis Dumont-Wilden, écrivain, biographe, critique belge et fondateur de l’hebdomadaire “Pourquoi pas?”.




15.8.24

Annie

Légende de la photo : En 2019, Annie était venue me soutenir chez Gallimard lors de la corvée du service de presse de ma biographie de Rigaut dont elle avait rédigé la remarquable préface.


Il y a toujours une part d’incrédulité quand on apprend la mort d’un être cher, puis la tristesse et l’accablement vous tombent dessus. J’ai appris le 1er août la mort d’Annie Le Brun (1942-2024), une mort brutale non annoncée en plein milieu de l’été. "J'espère que vous continuez à bien vous mouvoir dans cet étrange monde. », m’écrivait-elle dans l’un de ses derniers mails  qu’elle signait invariablement « De tout cœur ». C’est mon ami musicien Henri Graetz qui me l’avait présentée en 2013 lors de l’exposition "Victor Hugo et le surréalisme". Je l’avais revue ensuite au vernissage de la magnifique exposition "Sade-Attaquer le soleil" au musée d’Orsay dont elle était la commissaire générale et signataire du catalogue. En 2016, Henri Graetz m’invitait  à un concert de Nicolas Ker et d’Arielle Dombasle, improbable duo qu’il accompagnait au violon. Annie Le Brun était dans le public. A la fin du concert, je lui ai demandé si elle voulait bien m’écrire une préface pour ma biographie de Jacques Rigaut en voie d’achèvement. « Bien sûr, me répondit-elle, votre livre sera un événement. » En quelque pages, elle fit le plus beau portrait de Lord Patchogue. Je lui en serai éternellement reconnaissant. Annie Le Brun était une femme libre, elle vivait contre son temps. Visionnaire aussi, dans son premier livre en 1977, « Lâchez tout », elle dénonçait déjà les dérives sectaires et totalitaires du néoféminisme contemporain. Ce premier essai était un appel à la désertion : « Je serai toujours du côté des déserteurs contre les armées en marche. » Les « staliniennes en jupons » n’ont pas apprécié. Oui, toute sa vie, et à travers toute son œuvre, Annie Le Brun aura vécu contre son temps, contre l’enlaidissement du monde, contre la marchandisation de l’art, contre l’idéologie déconstructiviste. Annie Le Brun nous rappelait que « ce qui n'a pas de prix, ce sont les choses qui nous font vivre ». Elle va nous manquer, terriblement. 
 

24.7.24

29.5.24

New York

 


Le réalisateur Jean-Stéphane Sauvaire chez lui à New York avec ma biographie de Jacques Rigaut. Son dernier film “Black Flies” (Asphalt City) avec Sean Penn et Tye Sheridan, une adaptation cinématographique du roman 911 de Shannon Burke, raconte le quotidien de deux ambulanciers urgentistes dans le chaos urbain de Brooklyn. Photographie : Clarisse Gorokhoff. 

"New York, longue ville sans mystères, déchiffrable autant que ses rues bien aménagées pour les courants d’air. (...) Si vous êtes pressé, prenez plutôt une voiture de pompiers. Ceux-là ne s’ennuient pas, la ville est faite pour eux. Pour un mouchoir qui brûle, ils dévalent le long de la ville, doublent à droite, doublent à gauche, et si les autres voitures ne se rangent pas assez vite, montent sur le trottoir. Je préfère mourir brûlé." (Jacques Rigaut)




4.3.24

Jim

 


Le comédien et chanteur Henri Serre (1931-2023) est mort comme il a vécu, discrètement. Il connut son heure de gloire (méritée) en interprétant le rôle de Jim dans le « Jules et Jim » de Truffaut. En 1963, Louis Malle lui propose un petit rôle dans "Le Feu follet", Frédéric un jeune homme admirateur d’Alain Leroy. Henri Serre est mort le 9 octobre 2023 à l’âge de 92 ans dans sa maison de Saint-Jean-de-Bruel dans l’Aveyron où il s’était retiré depuis des années. Pour la regrettée émission "Cinémas, cinémas", Philippe Garnier installé aux Etats-Unis, filmait acteurs, réalisateurs, scénaristes des années glorieuses du cinéma hollywoodien, enregistrer les témoignages de ces hommes et femmes qui évoquaient leurs souvenirs, pour sauvegarder cette mémoire cinéphilique qui disparaissait au fil du temps. On regrette qu'en France, personne n'ait songé à sauvegarder cette mémoire. Personne n'est allé voir Henri Serre dans sa maison aveyronnaise pour lui demander d'évoquer ses souvenirs. Une mémoire aujourd'hui à jamais engloutie.        

25.1.24

Génies

 


Les éditions Séguier, toujours au top, publient en français les mémoires de Robert McAlmon (1895-1956), poète, écrivain, critique et éditeur américain. Il fut l’une des principales figures des expatriés américains à Paris. Il aide James Joyce à écrire Ulysses et sera le premier éditeur de Hemingway. Ami de Kiki et de Man Ray, il fréquente Rigaut à Montparnasse qu’il évoque dans ses souvenirs "Being Geniuses Together" publiés en 1938. Au début des années 50, il se retire à Desert Hot Springs (Californie) où il meurt en 1956, oublié de tous. On redécouvre aujourd’hui son rôle influent de passeur et son œuvre littéraire remarquable. En 2017, Maud Simonnot lui a consacré un émouvant portrait "La nuit pour adresse", paru chez Gallimard. 

 "Bande de génies » est disponible aujourd’hui dans toutes les (bonnes) librairies.  Le livre de 460 pages dispose d’un index au name dropping vertigineux… Rigaut en fait partie. Curieusement dans cette première édition VF, apparaissent des lignes inédites sur Rigaut que je n’avais pas trouvées dans le livre que j’avais à ma disposition qui était la deuxième édition américaine de ces mémoires parue en 1984. Les éditions Séguier ont travaillé avec la première édition parue en 1938 dont ils ont pourtant retranché certains passages, ce qui signifie que l’édition de 1938 était plus complète que celle de 1984 qui mentionnait bizarrement des ajouts au texte original. Encore une énigme à résoudre. 

Voici les passages inédits sur Rigaut qui sont formidables : «  Lorsque j’appris le suicide de  Jacques Rigaut, j’eus l’impression que ce qui était arrivé était parfaitement naturel. Il avait écrit quelques fragments de textes et était d’une certaine manière allié aux dadaïstes ou aux surréalistes, mais il s’en fichait. C’était un parfait dandy, un dilettante, un mondain, mais il était intelligent et, comme Drieu la Rochelle l’a écrit, c’était une valise vide. Il avait du charme, mais charriait une tristesse et un désespoir effrénés. Je fis un jour avec lui le trajet de Paris à Rouen en voiture, et il conduisait comme s’il cherchait à finir en bouillie. Il voulait avoir des histoires d’amour avec des femmes élégantes, belles, d’un certain renom ou bien célèbres qui avaient une carrière, un passé. Hormis, cela la vie n’avait pas l’air de l’intéresser. Du fait de quelque affinité, lui et moi nous nous entendions très bien et je l’appréciais beaucoup, de même que lui m’appréciait. Mais il ne manquait pas de me déconcerter. Il prenait rendez-vous pour le déjeuner ou le dîner en m’expliquant qu’il avait quelque chose à m’annoncer, et quand il me disait la chose en question, cela avait trait au passé, et ni lui ni moi ne pouvions plus rien y faire. Plusieurs années avant que je fasse sa connaissance, il était sorti un soir avec un ami très riche, auquel il avait subtilisé deux mille francs. Le vol n’avait pas échappé à l’ami, mais celui-ci n’avait rien dit ; puis, plusieurs années plus tard, le père de Rigaut entendit parler du larçin et remboursa l’argent. Rigaut était censé partir pour l’Amérique et entamer une nouvelle vie. Il ne voulait pas y aller et, en me quittant ce jour-là, il me dit : « Ne me méprise pas, quoi qu’on te dise que j’ai fait, d’accord ? » Mais, si je croyais son ton, ce n’était pas si important que cela pour lui. En tout cas, ce ne le fut absolument pas pour moi. Je l’appréciais, je me moquais bien de sa morale, ou de son comportement, parce que mon affection pour lui était totalement informelle. Il s’était marié, mais ça n’avait pas duré. Il fumait de l’opium ou le prenait en confiture, tout en déclarant que cela ne lui procurait pas beaucoup de sensations. Une nuit, après avoir fait un tour en ville avec quelques amis, il rentra au sanatorium où il séjournait pour soigner sa dépendance à l’opium. Là, il s’assit confortablement sur une chaise longue, en s’étendant sur quelques coussins, et se tira une balle dans le cœur. Ce fut une mort facile. Quand d’autres de ses amis se lamentèrent sur son suicide, je ne pus les imiter. Impossible pour lui d’affronter la vieillesse, la pauvreté, le fait de ne plus être un dandy et, pour l’homme à femmes qu’il était, de devenir de moins en moins désirable. Il était tout simplement dépourvu de ces impulsions à vivre ou à agir qui animent certaines personnes. Souvent, je me demande si ce ne sont pas les gens de ce genre  qui sont vulnérables à la drogue, car parmi ceux que j’ai connus et qui en ont consommé et souvent pendant assez longtemps, seuls quelques-uns  restent véritablement dépendants ou en gardent une envie irréfrénable. Lui n’avait pas cet irrépressible désir d’opium, du moins c’est ce qu’il prétendait; il voulait  seulement ne pas à avoir à affronter la réalité morose de l’ordinaire. »