Albert Cossery (Le Caire, 3 novembre 1913 - Paris, 22 juin 2008)
« Le pittoresque l'ennuyait. Il avait un mépris inné pour toute cette humanité remuante et férue de voyages qui semblait courir derrière le bonheur mais, en fait, n'arrivait qu'à tourner en rond, inapte à saisir autre chose qu'une vérole de plus ou de moins. Ce mépris découlait d'un instinct profond et non d'une attitude visant à la critique sociale ; il y avait longtemps que la réforme de ses contemporains avait cesser de l'intéresser. Il avait mieux à faire. Le combat qu'il menait était son combat personnel, journellement renouvelé, et ne tendait qu'à détourner à son profit une parcelle de cette joie égarée parmi les hommes, souvent imprévisible et méconnaissable. Avec cette éthique simple, essentiellement réaliste, il parvenait à être parfaitement heureux et, de plus, n'importe où ; il n'y avait pas pour lui d'endroits spécialisés dans le bonheur. » (Un Complot de saltimbanques, Albert Cossery)