29.6.07

Le cachet de la Poste faisant foi





Grâce aux 7 millions de pixels de mon appareil photo numérique et de la fonction "zoom in" de mon logiciel image, j'ai pu enfin dater une carte postale envoyée par Jacques Rigaut. Une datation très importante car cette carte était suivie de plusieurs lettres de J.R. non datées également et sans enveloppes... Si le cachet de la Poste fait bien foi et si je n'ai pas de problèmes de vue, la carte a été envoyée le 21 juillet 1914 à 16H. Etes-vous de mon avis?

Dancing in Harlem


Annonce extraite du catalogue
du libraire Henri Vignes

J'alterne recherches et rédaction. Confronté à l'épineux problème de datation. Des lettres non datées qui me permettraient d'établir une chronologie plus précise. Je dois retourner à la Bibliothèque littéraire Jacques Doucet pour tenter de déchiffrer le cachet de la poste d'une carte postale.

Ai reçu un courriel de Massimiliano Mocchia di Coggiola qui a créé en Italie un très beau site sur les dandys dont une page consacrée à Jacques Rigaut. Il évoque dans ce courriel un possible hommage de Coppola dans "Cotton Club" à la figuration de J.R. dans le film de Man Ray : "Emak Bakia". Quelqu'un pourrait m'envoyer l'adresse e-mail de Francis Ford Coppola?

Extrait du courriel (traduit de l'italien par Babel altavista)

"Je m'intéresse au niveau professionnel d'art, histoire
de l'art et histoire du cinéma ; en relation à ce point
j'achève, les écrits pour vous signaler un
hommage à Jacques Rigaut présent dans le film "Cotton
Club" (de Francis Ford Coppola, 1984) ; dans une
scène, vers la fin du film, on voit le protagoniste
Richard Gere qui enlève le col amovible de la
chemise et il le jette par terre, c’est évidemment la
reprise fidèle de la même scène du film "Emak Bakia"
de Man Ray, dans lequel Rigaut enlève son faux col,
l'arrache et le jette sur le plancher. Dans le film il
est même présent un autre hommage dirigé à Man Ray :
dans une scène d’amour du film, l'actrice protagoniste
Diane Laines est encadrée d'épaules, nue, et sur le
dos ils s'entrevoient peintes sur son dos les deux "f"
de violon, exactement comme dans la célèbre photo le
Violon d'Ingres."



24.6.07

Hommages & etc.


Merci à Bertrand Delcour
pour cette couverture
de l'édition 1964

Poème hommage de Thomas Roussot

"Un trente décembre en déshérence
Apparaît vers deux heures
Ce silence hostile aux yeux
Montaigne/Louis-Le-Grand en impasses figées
La Baule et l'Artillerie pour horizon déclinant
Puis fait front en Lorraine
Les idées sombres à l'affût
Fausse armistice posée sur l'épaule
Battant d'un coeur résolument démobilisé
Il sera sérieux
Et même brillant sujet
Drieu en reflet sur la Côte Basque
Lune de fiel à Palm Beach
Héroïne et vie clinique
Un six novembre il visera l'absence
Une saveur de mortalité aux tempes
Et cette détonation opaque et rapide
Pour testament inhérent"

18.6.07

Quand la réalité dépasse...



Tristan Ranx m'a envoyé aujourd'hui ce courrier. Il y relate une (récente) anecdote entièrement véridique qui aurait pu tourner au fait divers. Méfiez-vous si une Suédoise commence à vous parler du "Feu follet".


"Mon ami l’écrivain Pascal Guy m’a raconté cette mésaventure qui lui est arrivé dernièrement. De sortie dans un pub, il rencontre une suédoise. La conversation est facile, les corps se rapprochent, et les pintes de bière s’enchaînent vers un dénouement connu par des millions de couples dans le monde. C’est une nuit carpe diem, et les anges passent et susurrent des mots doux. Pascal invite alors la charmante scandinave à venir chez lui. Elle accepte effrontément avec cette manière crue des filles du nord, à qui on ne la fait pas... Le tempérament latin de Pascal s’échauffe, la nuit parisienne est un sentier qui conduit vers les plaisirs du septième ciel. Arrivé dans l’appartement situé à quelques encablures de l’appartement d’Hemingway, il se sent soudain investi d’une mission étrange en proposant à la sauvage Viking de regarder l’extrait du « Feux follet » sur le blog de Jean Luc Bitton. L’idée parait étrange, comme une forme particulière de préliminaire dadaïste. Ne connaissant ni l’œuvre de Jacques Rigaut, ni celle de Drieu la Rochelle, la belle sensuelle accepte l’invitation – « C’est sur le suicide », lui explique Pascal. Elle acquiesce, curieuse. Pascal, à cet instant, sait il que le suicide est une activité suédoise à part entière ? Sait-il que le fantôme de Stig Dagerman et son inconsolable besoin de consolation rôde dans les combles de son immeuble de la Renaissance ? Le film s’enclenche, faisant perdre la notion du temps aux deux tourtereaux, noyés dans les arpèges de Satie et les déambulations de Maurice Ronet. Puis, comme une incantation hypnotique « le demain je me tue » du protagoniste clôt la séquence. Silence de mort. La Suédoise ne dit rien, les minutes passent comme ne point de non retour ou le suicidé décide d’appuyer sur la gâchette. C’est l’émotion qui submerge deux êtres que tout réunis dans la croisée d’ogive entre Eros et Thanatos... « c’est comme ça que je veux finir » dit-elle soudain, en regardant son pygmalion dadaïste dans les yeux. Pascal se sent soudain propulsé vers un destin qui lui échappe. « Comme ça ? » dit –il » espérant secrètement n’avoir pas compris... « oui, dit-elle, je veux mourir avec toi ». Un fond de romantisme noir, puisé dans la lecture de Mishima submerge Pascal et il répond par un téméraire, « Oui, suicidons-nous ! ». L’invitation au suicide est lancée. Deux shots de vodka sont bus pour sceller la folie des amants. « Tu as un couteau ? lui demande-t-elle ». C’est le côté pragmatique, realpolitik des nordiques qui vient demander son dû. En homme du sud sanguin comme un espagnol, Pascal s’empare d’ un magnifique couteau à couper le saucisson. « Taillade-moi, tue-moi » lui, crie t’elle en se jetant au sol . Dans le grand miroir Pascal aperçoit alors son reflet avec un visage blafard, un couteau à la main, une walkyrie à ses pieds et la dernière image du Feux Follet gelée sur l’Ecran. Croyez moi, d’après ce que Pascal ma dit, il n’en faut pas plus pour qu’un homme s’écroule et perde définitivement la raison, mais les choses ne s’arrêtèrent pas là... La Raison cartésienne s’impose impérativement à Pascal dont la rue porte de nom de Descartes. Il jette un dernier regard effaré vers cette image baroque d’une femme offerte au bourreau. L'homme dit non... La femme gémit à ses pieds. « Non ! hurle t-il, Non ! je ne peux pas ! » , « Vas y lui répond-t-elle, fais moi mal, tue-moi ! » Les choses vont trop loin, Rigaut ricane dans son coin d’écran, mais plus personne ne rit. Pascal jette le couteau sur le sol. La furie en sursis s’empare soudain de l’arme blanche et la brandissant devant elle, les yeux inondés par les images de Rigaut, elle abat la lame sur le bras de Pascal, entaillant l’avant bras sur trente centimètres dans le sens de la longueur. Le sang gicle. Pascal hurle. La fille se tait, se lève et disparaît dans la nuit."


17.6.07

L'ANPS






Merci à Franck de m'avoir signalé ce court métrage qui met en scène l'ANPS et ses services...Un établissement qui n'est pas sans rappeler l'AGS, "L'agence générale du suicide", dont Jacques Rigaut était l'administrateur principal.

15.6.07

Avez-vous lu Emmanuel Bove?


Emmanuel Bove et sa fille Nora au jardin
du Luxembourg à Paris, vers 1924


Je tenais à rendre hommage à l'écrivain et journaliste Paul Morelle qui vient de disparaître (voir l'article du Monde ci-dessous). Je l'avais rencontré lors de mes recherches sur l'écrivain Emmanuel Bove qu'il avait défendu dès les premières rééditions en 1977. Alors journaliste littéraire au Monde, il avait publié dans le "Monde des livres" un article mémorable intitulé : "Avez-vous lu Emmanuel Bove?" Ce ne fut pas une mince affaire : "Quand j'ai annoncé à la conférence de rédaction que je voulais faire un article sur Emmanuel Bove, tous m'ont regardé avec des yeux ronds..." Finalement, l'article paraîtra en première page du "Monde des livres" le 3 décembre 1977.

NECROLOGIE

"L'écrivain et journaliste Paul Morelle, mort à La Seyne-sur-Mer (Var) à l'âge de 89 ans, faisait partie de la première équipe du "Monde des livres" dirigée par Jacqueline Piatier, puis par François Bott. Engagé en 1969, il y resta jusqu'à sa retraite, en 1980. Ceux qui l'ont connu, promenant sa silhouette un peu voûtée, pipe à la bouche, dans les anciens locaux du journal, rue des Italiens, se souviennent de sa voix éraillée, de son humour un peu caustique et de sa grande liberté d'esprit.Né dans l'Oise, Paul Morelle milite très jeune à la SFIO et côtoie l'élite intellectuelle de l'époque - il fut notamment l'ami de Victor Serge. "Ce furent mes "universités"", dira-t-il. Après un engagement résolu dans la Résistance qui lui vaudra d'être plusieurs fois décoré, il commence sa carrière de journaliste à Franc-Tireur, puis à Oran-Soir. De 1948 à 1964, il dirige le service culturel de l'ancien Libération. Critique de théâtre, il se lie d'amitié avec Jean Vilar, Jean-Louis Barrault, Gérard Philipe... A 61 ans, en 1978, il publie son premier roman, La Douceur de vivre (éd. Le Sagittaire), puis, deux ans plus tard, un second, L'Embusqué (Stock). Dans ces deux livres, il se fait le chroniqueur alerte et peu conformiste des époques qu'il a traversées, celle du Front populaire puis celle de la guerre.En 1984, c'est à Aragon qu'il s'en prend, dans un pamphlet virulent, Un nouveau cadavre, Aragon (La Table ronde). Ni la vie ni l'oeuvre de celui qu'il nomme "l'homme-caméléon" ne trouvent grâce à ses yeux. "La mort n'est pas une excuse", avance-t-il, citant Georges Darien, pour justifier son geste iconoclaste. A la même époque, Paul Morelle relance le Prix du roman populiste, qui, créé en 1931, avait eu ses heures de gloire, avant de tomber en désuétude au début des années 1960."

Patrick Kéchichian, le Monde du 7 juin 2007

11.6.07

Son Harrar



7 décembre 1923

61 Washington Square
N.Y.C.


Mon cher Monsieur Blanche,

Vous aimeriez New York. Du matin jusqu’au soir, c’est un spectacle. Tout est plus. Les boutiques sont plus belles, les femmes sont plus jolies, il est plus facile de traverser les rues, les gens riches sont plus riches, les pauvres sont plus misérables, et les juifs, les juifs plus nombreux, etc. [...]

(Extrait d'une lettre de Jacques Rigaut à Jacques-Emile Blanche)

5.6.07

Lettre à Jacques Rigaut



Lettre publiée dans le N°31 (juin 2007) de "décapage", une revue littéraire indépendante à 5 euros reconnue d'inutilité publique.

2.6.07

Un suicide fleuri



Jacques Rigaut a eu plusieurs éditeurs posthumes : Au Sans Pareil, Eric Losfeld, Jean-Jacques Pauvert, Christian Bourgois, Gallimard et les éditions Cent Pages qui ont publié un florilège des "Ecrits". Cette iconoclaste maison d’édition grenobloise (on se souvient du vibrant "J’emmerde Le Monde", un (premier) discrédit jeté alors sur le célèbre quotidien du soir, rédigé par Olivier Gadet, directeur de Cent Pages) vient de m'envoyer l'ouvrage d'un certain André Baillon, écrivain belge dont j'ignorais l'existence. Voici un extrait de sa biographie trouvé sur un site qui lui ait consacré :

"À sa sortie d’hôpital, il s’installe dans une maison modeste du village de Marly-le-Roi, à une vingtaine de kilomètres de Paris, où il écrit et vit en ermite pendant quelques années. En 1930, il noue une liaison dévorante avec un écrivain bruxellois, Marie de Vivier, une admiratrice de son œuvre qui est sa cadette de vingt-quatre ans et cherchait à le rencontrer. Ils échangent des centaines de lettres qu’ils brûlent dans leurs moments de crise et tentent ensuite de reconstituer. Ils essayent de se tuer l’un l’autre, organisent en duo leur suicide mais se ratent, puis tentent en vain de se suicider séparément. Marie de Vivier entre finalement dans un hôpital psychiatrique. Baillon inonde sa propre chambre de fleurs et absorbe une overdose de somnifère Dial. Il ne se réveillera pas: le 10 avril 1932, il meurt à l’hôpital de Saint-Germain-en-Laye où Germaine l’a fait transporter. Après sa mort, son œuvre tombe rapidement dans l’oubli. Ce n’est qu’à la fin des années septante que plusieurs critiques en viennent à le considérer comme le plus grand écrivain que la Belgique francophone ait connu dans la première moitié du XXe siècle."