30.12.07

Signes





Merci à Jesus Alvarez et Jean-Pierre Hérant qui m'ont envoyé ces "signes".

23.12.07

Un pressentiment

J'espérais naïvement qu'il vive jusqu'à la parution de la biographie de J.R. qu'il aurait aimé lire. L'écrivain Julien Gracq vient de mourir à l'âge de 97 ans. Etrangement, je relisais avec émotion, hier soir, la lettre qu'il m'avait envoyée, dans laquelle il répondait à mes interrogations au sujet du personnage de son roman, Un beau ténébreux. Son écriture en pattes de mouche ressemble à celle de Beckett. Une écriture ramassée, fine et régulière, discrète, comme si son auteur s'excusait de vous écrire. Pour écrire à Julien Gracq, il suffisait de mettre son nom accolé à celui de Saint-Florent-le-Vieil (où il était né et vivait retiré) et le code postal. Le facteur ne se trompait jamais. D'après une dépêche, Gracq aurait succombé à une hémorragie digestive. Dernier clin d'oeil ironique, lui qui écrivit un essai sur la déliquescence du milieu littéraire, intitulé : La Littérature à l'estomac.




" (...) Je ne saurais guère vous dire plus là-dessus, d'autant plus que le temps efface pour l'auteur les origines du livre. Nul doute que votre biographie m'apprendra beaucoup, je vous en remercie d'avance. Julien Gracq" (Lettre du 25 août 2005 à JLB)




"Le jour se lève, ça vous apprendra."



"Il avait ce sens terrible de la destinée."
(Philippe Soupault à propos de Rigaut,
extrait d'un entretien inédit)

Bonne fêtes à toutes et à tous.

22.12.07

Une histoire (hénaurme) d'archives


Jacques Doucet par Cappiello

"Le succès de la dispersion d’une collection René Char par l’étude Renaud-Giquello à Drouot, le 5 décembre, cache une réalité moins reluisante. Jamais ces «aphorismes» et «dialogues», cette suite de manuscrits, livres rares, lettres, dessins, aquarelles ou gravures n’auraient dû être mis à l’encan : ils avaient été donnés par la compagne du poète, disparu en 1988, à la bibliothèque littéraire Jacques-Doucet. «Cette vente est l’histoire d’un don dédaigné» : Anne Favre-Reinbold avait écrit un texte liminaire destiné au catalogue, finalement abandonné par pudeur. Elle a bien voulu nous en confier le récit.

Fin 2000, elle a offert, sans contrepartie, la totalité des archives accumulées durant les vingt ans partagés à l’Isle-sur-la-Sorgue. Le don «est accepté avec reconnaissance» par cette bibliothèque prestigieuse qui dépend de l’université de Paris. Elle est reçue par un directeur, Yves Peyré, charmant et mondain. Mais il n’ira jamais la voir.

Listes. Anne Reinbold attend une aide pour inventorier cette masse, d’autant qu’elle redoute un peu l’émotion de cette plongée. Rien ne vient. Elle finit par s’y mettre, dressant des listes, dont chaque feuillet sera signé par le directeur, sans voir aucun document. Elle empaquette tout. En novembre, onze mois après son offre, elle reçoit un courrier d’acceptation, dans lequel le recteur, René Blanchet, la remercie de son «précieux concours», lui assurant que, comme requis, sa collection «ne sera jamais divisée, ni séparée de la bibliothèque Doucet». «La bibliothèque est objectivement enrichie et Char ne peut qu’y gagner», s’enthousiasme Yves Peyré, quelques jours plus tard. Mais personne ne vient prendre livraison des cartons. Yves Peyré semble toujours débordé. «Tout a été réglé concernant votre donation, il ne s’agit que de prendre possession au mieux des documents», écrit-il en juillet 2002.

Bobards. Sans nouvelles, cet été, elle rouvre les cartons, et remet les ouvrages en place. Elle en avertit la bibliothèque. En mars 2003, le directeur la prie de tout remettre en caisses. Ce qu’elle fait. Le 8 avril, il promet le transport pour septembre. Toujours rien. On lui raconte des bobards, allant jusqu’à lui parler d’un transporteur qui ne s’est jamais manifesté. Finalement, plus personne ne répondra à ses appels ou courriers. Lassée de tant d’«impéritie des institutions», elle se résigne à une vente, qui rapportera plus de 500 000 euros. «Il s’agissait d’un ensemble particulièrement cohérent», se désole-t-elle. On pouvait y retrouver le parcours du poète, de la notule jetée à l’aube, reformulée en carte postale, jusqu’aux épreuves corrigées. Une eau-forte de Giacometti accompagne une édition originale de Poème des deux années, avec cet envoi : «Pour Anne, des années que les dieux n’ont pas compté pour nous, R.» "


"Suite au récit, paru hier dans Libération, de la compagne de René Char, révélant comment elle s’était résignée à mettre en vente à Drouot les archives de vingt années de vie commune avec le poète, après les avoir offertes en vain à la bibliothèque littéraire Jacques-Doucet, la ministre de la Culture Christine Albanel a exprimé son émotion en «déplorant cette perte pour le patrimoine». Le ministère de l’Education, qui a la tutelle de cette bibliothèque de l’Université de Paris, n’avait cependant pas réagi hier.

Contacté avant la parution de l’article, l’ancien directeur de Doucet s’explique aujourd’hui, en confirmant que cette donation avait été, en 2001, «facilement acceptée». Déménagé depuis à la bibliothèque Sainte-Geneviève, Yves Peyré souligne qu’une de ses collaboratrices est allée aider Anne Reinbold à inventorier ce fonds d’archives. Le fait n’est pas contesté, même si apparemment cette assistance a tourné court.

Yves Peyré reporte son échec sur l’imprévoyance d’un chauffeur-livreur qui aurait «oublié» d’aller chercher les cartons. Contrariée, et «amplifiant» cet incident au-delà du raisonnable, Anne Reinbold aurait alors annoncé que ses projets «étaient changés et défait les cartons». En dépit de «trois à quatre lettres envoyées en 2002 et en 2003 pour dissiper le malentendu et reprendre le fil d’une donation qui était précieuse», Yves Peyré assure n’avoir «pas une seule fois obtenu de réponse».

L’intéressé, qui n’est pas très sûr du nombre de courriers et se trompe de plusieurs années sur les dates, a dû garder une mémoire embrouillée des événements. Libération dispose d’une copie des courriers envoyés pendant des années par Anne Reinbold afin de concrétiser sa donation, et des réponses espacées, cavalières et dilatoires, du directeur de la bibliothèque, qui se plaint constamment d’être débordé dans son travail. Il a raison néanmoins de juger «cette histoire aussi triste que curieuse dans ses développements»."

Source : Libération du 20 et 21 décembre 2007

20.12.07

Suicidés de la littérature

Lever aux aurores hier pour prendre le train Paris-Caen où se trouve l’Institut Mémoires de l’édition contemporaine (IMEC) qui abrite des fonds d'archives d'auteurs, d'éditeurs et des acteurs de la vie littéraire contemporaine. C'est à l'IMEC que j'ai créé le fonds Emmanuel Bove. Les auteurs devraient de leur vivant déposer leurs archives dans ce genre d'institut, accompagnées de directives précises quant à l'exploitation éditoriale de leur oeuvre. Cela éviterait bien des imbroglios posthumes où les ayants droit se déchirent autour de manuscrits et autres artefacts littéraires. J'ai passé donc ma journée dans cette imposante abbaye d'Ardenne qui abrite la salle de lecture. Les précieuses archives se trouvent dans un autre bâtiment souterrain qui communique également souterrainement avec l'abbaye. Je n'ai malheureusement pas trouvé ce que j'étais venu y chercher : la fiche d'abonné du lecteur J.R. En revanche, j'y ai trouvé une émouvante lettre de Martin Kay qui raconte sa découverte en 1965 d'autres archives, celles de Jacques Rigaut, quelques feuilles manuscrites et correspondances qu'avait conservées le frère de J.R. qui venait de décéder dans un accident de voiture. Pour finir, j'aimerais rendre hommage à l'éditeur et ex-président de l'IMEC, Christian Bourgois qui vient de disparaître. En 1974, avec Eric Losfeld, il publia dans sa fameuse collection 10/18 le recueil des textes de Cravan, Rigaut et Vaché sous le titre : Trois suicidés de la société.





Entre Paris et Caen


L'abbaye au petit matin


La salle de lecture dans l'abbaye

17.12.07

J.R : l'homme de l'année 2007

3:AM NOVEL OF THE YEAR 2007
Our novel of the year could have been Tom McCarthy’s Men in Space, Matthew De Abaitua’s The Red Men or Steven Hall’s Raw Shark Texts, but we had to choose only one and that one is David Lalé’s remarkable but strangely-overlooked Last Stop Salina Cruz (Alma Books).

3:AM NON-FICTION BOOK OF THE YEAR 2007
Tom Bradley’s Fission Among the Fanatics.
A literary giant among pygmies.

3:AM ALBUM OF THE YEAR 2007
Puerto Merto’s Heaven & Dirt: Requiem For the Texas Chainsaw Massacre (Fire Records).
Divine sleaze.

3:AM MAGAZINE OF THE YEAR 2007
Bad Idea
Everyday life, extraordinary tales. Indie publishing at its most ambitious.

3:AM PUBLISHER OF THE YEAR
Akashic Books
A decade of reverse-gentrification of the literary world.

3:AM WEBSITE OF THE YEAR
Dazed Digital
At long bloody last.

3:AM BLOG OF THE YEAR 2007
L’Excentré Magnifique
Jean-Luc Bitton’s site dedicated to his work-in-progress on literary suicide Jacques Rigaut.

Source : 3:AM MAGAZINE

16.12.07

Bday


My Gladys gave me a flask...

15.12.07

Hasard objectif

Bonjour Jean-Luc,

Je découvre, ce matin, qu'E. Breton, marbrier de son état, figure dans la liste des Breton abonnés aux réseaux téléphoniques de Paris en 1917-1918, qu'André Breton utilisa pour sa lettre-collage à Jacques Vaché (Cf. L'imprononcable jour de sa mort - Jacques Vaché - Editions Jean-Michel Place).Nord.... 13.40 Breton (E.) mon. funèb., av Cimetière-Parisien, 23, Pantin. On ne sort jamais du cercle...

La liste en question n'est pas reproduite dans la lettre-collage à Vaché, mais dans la revue Cannibale (mai 1920) sous le titre PSST.

La famille de Crevel n'y pouvait rien, la messe était dite, la réalisation du caveau étant antérieure à sa mort. Une nouvelle "visite" s'impose pour préciser la date de l'ouvrage d'E. Breton (probablement en 1914, année du suicide du père de Crevel). On est saisi d'un certain malaise lorsque l'on découvre le nom de René gravé sur un caveau de famille, à proximité d'une grande croix. Étrange compagnie en égard à sa vie (rejet du cercle familial), à ses écrits, ses engagements. La mort a des outrages, mesquins.

à suivre donc.

Renseignements pris, l'ouvrage du marbrier Breton date probablement de juillet 1914, à l'heure du décès du père de Crevel, Paul. En mai 1920, André Breton passe donc en revue ses "homonymes" dans la revue Cannibale et rencontre Crevel en novembre 1921. Hasard plus ou moins objectif, donc. Breton ne craignait pas d'enfiler les raisons sociales (je pense au [Bois&Charbons] avec Soupault). Alors pourquoi pas celle-ci, malgré lui.



ps. Michel Carassou nous livre, dans sa biographie de Crevel, les derniers instants:[...] puis griffonne quelques mots sur un papier qu'il épingle au revers de sa veste "Prière de m'incinérer. Dégoût". Nul n'aura entendu cette ultime adresse. Les fiches du conservatoire du cimetière de Montrouge indiquent que Crevel ne l'a pas été.

Nouvel élément troublant qui m'avait échappé. Au rez-de-chaussée de l'Hôtel des Grands Hommes (résidence de Breton de septembre 1918 à juillet 1920) la Maison Borniol... pompes funèbres (il y a semble-t-il une expression "va te faire voir chez Borniol" pour va au diable). Sur le forum Languefrançaise.net on peut lire: Je confirme l'origine de borniol (mais je ne connais pas son orthographe exact) comme venant des pompes funèbres du même nom et qui, dans le milieu théâtral et audiovisuel, représente un morceau de coton gratté (en général)noir utilisé pour masquer une source lumineuse, un élément indésirable (pied de caméra sur un plateau par ex) etc... Vraiment troublant au plan de l'occultation, non? Georges Sebbag résume fort bien dans [l'imprononçable jour de sa mort] le don d'André Breton (dans le cas de la lettre-collage à Vaché, mais qui fonctionne ici): pressentir un passé qu'on ignore (E.Breton « constructeur de l'ultime « demeure » de Crevel).

Cordialement,

Emmanuel


9.12.07

Rigaut si é fermato a Amalfi

Travelling sur la côte d'Amalfi (Italie)




"L'été suivant, je me trouvais en Italie, sur le petit bateau d'un ami dans le golfe de Naples." (Ecrits, Jacques Rigaut) J.R. s'est arrêté à Amalfi...Il est decendu à l'Albergo della Luna où j'espère bientôt faire un pélerinage. L'auberge de la Lune est un ancien couvent byzantin qui fut la demeure d'Ibsen et de saint François d'Assise. Si vous voulez voir la vue qu'avait Jacques Rigaut de sa chambre, cliquez ici. (Merci à Emmanuel pour la vidéo de la côte amalfienne)

Ai revu hier, lors d'une soirée, le réalisateur Philippe Collin qui a été l'assistant à la mise en scène sur le Feu follet de Louis Malle. Il y fait également une figuration, dans la scène des toxicomanes on le voit (fugitivement) caché dans un placard comme allongé dans un cercueil. Il m'apprend qu'une édition américaine du Feu follet est en cours avec un bonus différent de l'édition française dont des entretiens avec Alexandra Stewart et lui-même.

7.12.07

Arrêt sur image





Jacques Rigaut en 1926
dans le film "Emak Bakia" de Man Ray

Alliance ou pas alliance?
Marque du costume?
Lord Patchogue en arrière-plan?
Le tableau accroché au mur?
Etc.