3.11.08

Suicide lettriste




Se suicider




v. pron. (1795 ; de suicide, néologisme forgé sur homicide (lat. sui, et suff. -cide)).


se donner volontairement la mort, de manière fort déplacée en société ou chez des amis. v. se défaire, se détruire, se flinguer, déchirer sa mousseline, laver ses cheveux avec du plomb, s'ouvrir un abreuvoir à mouches dans la figure, repeindre la salle de bains. le verbe est très usité aujourd'hui, et l'on parle à tort et à travers de "se suicider", que ce soit pour contrarier sa famille, une fiancée qui s'éloigne, un patron qui délocalise. mais on a tort, car le verbe est contrefait : il contient deux fois le pronom "se". suicide équivaut à "soi-meurtre" ; se suicider équivaut donc à "se soi-meurtrir". ceci met en évidence le vice de formation, le caractère égoïste et sale, de celui qui prétend à tout bout de champ "se suicider". l'amoureux de la langue, qui répugne aux barbarismes, ne "se suicidera" donc qu'avec parcimonie, par respect pour le beau style et la grammaire. "on reconnaît les grands peuples à la qualité de leurs suicides. rome, le japon des tokugawa, les civilisations précolombiennes, ont élaboré des suicides flamboyants et raffinés, le plus souvent forcés ou collectifs. ici, on se suicide toujours seul, petitement, derrière une palissade, sans jamais faire d'effort pour éliminer tout le monde." (maurice pinguet, la mort volontaire au japon). / jean améry, bruno bettelheim (la tête dans un sac), bernard buffet, paul celan ("lait noir de l’aube nous te buvons la nuit"), thomas chatterton, arthur cravan (au cours d'une traversée de l'atlantique à la rame), rené crevel ("prière de m’incinérer. dégoût"), stig dagerman, osamu dazai ("pardonnez-moi d’être né"), guy debord ("le léopard meurt avec ses taches"), gilles deleuze ("ce sont les organismes qui meurent, pas la vie"), nicolas de staël (depuis la fenêtre de son atelier), patrick dewaere (d'une balle de 22 long rifle dans la bouche, devant un miroir), pierre drieu la rochelle ("la courbe mollissait, je la redresse"), serge essénine ("au revoir, mon ami, au revoir"), jean eustache, nino ferrer (une arme à feu, dans un champ de blé), sigmund freud, romain gary ("aucun rapport avec jean seberg"), hervé guibert, ernest hemingway (d'un fort coup de fusil), vladimir jankélévitch ("la mort est par excellence l’ordre extraordinaire"), kostas karyotakis, yasunari kawabata, arthur koestler (avec son épouse, barbituriques), jerzy kosinski (dans une baignoire, avec un sac en plastique), paul lafargue, philippe lemaire (sous un métro), edouard levé ("ta vie fut une hypothèse"), malcolm lowry ("nulle paix qui ne doive payer plein tribut à l'enfer"), vladimir maïakovski (une balle dans le coeur), klaus mann, yukio mishima (une dague dans le ventre, et décapité par un ami), henri de montherlant, gérard de nerval ("ne m'attends pas ce soir car la nuit sera noire et blanche"), cesare pavese, jules pascin, sylvia plath (four à gaz), jean potocki (à l’aide d’une petite balle d’argent, façonnée à partir du couvercle d'une théière, polie par ses soins, bénie par le chapelain du domaine, qu'il se tira ensuite en pleine tête), jean-joseph rabearivelo, alexandre radichtchev, jacques rigaut ("mon livre de chevet, un revolver").... LA SUITE ICI