12.1.24

Chez J.J.S.

 






“Désormais les Rolling Stones ne sont plus cinq mais six: cinq + un cadavre, ils se sont enrichis d’un grand vide. Un accident de plus pour eux et depuis que Brian Jones est mort ils ont encore embelli puisque la beauté est une somme d’accidents.” ( Jean-Jacques Schuhl, Rose poussière

Lors du service de presse de ma biographie de Rigaut, j’avais demandé qu’on envoie un exemplaire à l’écrivain Jean-Jacques Schuhl, puisque je l’évoquais comme celui qui avait fait découvrir Rigaut à son ami Jean Eustache. Ma demande n’avait pas été prise en compte. Les années ont passé et je m’étais toujours promis de lui remettre cet exemplaire en main propre. C’est chose faite. J’en ai profité pour me faire dédicacer son premier livre Rose poussière dont il remet le manuscrit chez Gallimard en 1972 sans connaître personne. Georges Lambrichs qui dirigeait la collection "Le Chemin" l’appelle, enthousiaste. Au comité de lecture, Raymond Queneau défend le livre contre Claude Roy qui n’en voulait pas. On connaît la suite, le livre deviendra culte comme son auteur. Durant notre conversation, JJS évoque Rigaut, Eustache mais aussi Frédéric Berthet : “L’univers de Berthet, ce n’est pas noir; c’est bleu nuit plutôt. Et tendre également, comme la nuit.”  Lorsque j'évoque la carte à jouer et l’enveloppe Lord Patchogue envoyée à l’adresse new-yorkaise de J.R., deux objets trouvés dans les papiers de Rigaut après son suicide, l’auteur de Rose poussière s’est écrié : « ce sont des objets magiques ! » Effectivement, ces deux reliques sont « chargées » du pouvoir de leur ancien propriétaire. On rappellera que Jacques Rigaut dans une villa d’Oyster Bay sur Long Island, un dimanche de juillet 1924, en jouant seul à une réussite et posant une carte l’une sur l’autre, image métaphorique du changement d’identité, devient Lord Patchogue, puis relevant la tête et apercevant son reflet dans un miroir, se jette dans ce dernier pour le briser. En traversant le miroir Lord Patchogue tue Jacques Rigaut, un meurtre-suicide qui préfigure le destin tragique du poète. Ces reliques ont été magnifiquement encadrées par Édouard de l’Atelier Demi-Teinte, qui avait exposé dans sa vitrine la carte à jouer, plusieurs personnes sont entrées dans sa boutique pour poser des questions sur cette carte. Magique!

P.S. : Ce soir à la maison de la Poésie, soirée hommage à Daniel Darc avec un concert de Frédéric Lo.
Je vous souhaite évidemment the best pour 2024...